L'Histoire Des Psychédéliques Dans Le Monde
Publié le :
Janvier 22, 2025
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Les psychédéliques sont utilisés depuis que les êtres humains marchent debout. Nous revenons ici 9 000 ans en arrière et parcourons le monde pour montrer à quel point l’usage des psychédéliques a été répandu.
Beaucoup de choses unissent l’humanité, bien plus qu’elles ne la divisent. L’un des nombreux éléments qui nous lient est notre amour des psychédéliques, qui, dans une grande partie du monde moderne, passe souvent sous silence et est activement réprimé par les gouvernements. Mais rassurez-vous, l’humanité aime et a toujours aimé les substances psychédéliques.
Nous jetons ici un bref coup d’œil sur l’histoire des psychédéliques dans le monde afin de dissiper l’impression que la « science occidentale » vient de les découvrir.
APERÇU DE L’USAGE DES PSYCHÉDÉLIQUES DANS LE MONDE
On pourrait penser que l’usage des psychédéliques est un phénomène relativement moderne, avec peut-être quelques cas historiques liés à des cultures semi-mythologiques. Cependant, la réalité est que les psychédéliques ont été utilisés tout au long de l’histoire de l’humanité par des personnes de toutes les cultures, de tous les groupes ethniques, de toutes les religions, etc. En fait, il serait même exact de dire que les cultures qui n’ont jamais consommé de psychédéliques sont des anomalies (et qu’elles n’existent peut-être même pas du tout).
Étant donné que la consommation de psychédéliques est un comportement humain très courant et partagé, nous allons examiner ci-dessous leur utilisation au cours de l’histoire dans différentes cultures, et quel impact ces substances ont eu sur les sociétés et les religions du monde entier.
Mais avant d’aller plus loin, soyons bien clairs sur une chose : nous n’avons tout simplement pas la place dans cet article pour retracer l’histoire complète des psychédéliques dans le monde (ce serait l’œuvre d’une vie). Nous allons plutôt faire le tour du monde et sélectionner quelques points forts qui démontrent que l’utilisation des psychédéliques est un phénomène universel chez les êtres humains.
ASIE
L’Asie a une histoire riche en matière de psychédéliques. Des toundras nordiques de Sibérie à la chaleur tropicale de l’Inde, on sait que les champignons psychédéliques font partie intégrante de ses diverses cultures depuis des millénaires.
En commençant par le nord, il existe de nombreuses preuves (y compris des usages contemporains) que les chamans sibériens utilisaient les champignons Amanita muscaria (amanite tue-mouches) dans le cadre de pratiques rituelles et religieuses. On pense également que ce même champignon fait partie intégrante du Soma, un élixir utilisé par les anciens hindous et mentionné dans le Rig Veda, un important texte hindou qui daterait d’environ 3 000 ans.
Dans l’Asie du Sud-Est d’aujourd’hui, la population locale consomme couramment les champignons Psilocybe cubensis et il n’y a aucune raison de penser que la consommation de ce champignon ancien est un phénomène moderne.
Ces exemples ne font qu’effleurer l’utilisation continue des psychédéliques en Asie, mais ils témoignent de l’ancienneté et de l’étendue de cette pratique.
AMÉRIQUE DU SUD
L’Amérique du Sud est peut-être le continent dont l’histoire avec les psychédéliques est la mieux connue. Des déserts d’Amérique centrale aux jungles denses du Sud, ce continent entretient une relation intime avec certaines des substances psychédéliques les plus puissantes de la planète. Qui plus est, nombre de ces pratiques se sont poursuivies, sans interruption, jusqu’à nos jours.
Nous évoquerons brièvement trois substances psychédéliques : les crapauds hallucinogènes, les Mayas mangeurs de champignons et les cultures autour de l’infusion d’ayahuasca.
Le crapaud du désert de Sonora, au Mexique, vit dans le désert de Sonora. Ce crapaud excrète du 5-MeO-DMT, une puissante substance psychédélique qui peut être absorbée simplement en léchant le dos du crapaud. Toutefois, il est beaucoup plus sûr de recueillir, de sécher et de fumer les excrétions. Historiquement, le peuple Comcaac a utilisé ce composé dans ses pratiques spirituelles.
Les Mayas d’Amérique du Sud ont entre autres parmi de nombreuses substances, utilisé les champignons magiques Psilocybe cubensis dans leurs pratiques religieuses. L’utilisation la plus ancienne remonte à environ 1 000 ans avant notre ère, ce qui signifie qu’on l’utilise depuis au moins 3 000 ans, et probablement bien plus.
Les groupes indigènes de la région de la Haute Amazonie préparent depuis longtemps l’ayahuasca, un breuvage psychédélique qui contient le principe actif N, N-DMT (différent du 5-MeO-DMT). Peut-être plus que toute autre pratique psychédélique traditionnelle dans le monde, celle-ci a capté l’attention du monde moderne et a entrainé l’arrivée de masses de gens dans la jungle chaque année pour participer aux cérémonies avec l’ayahuasca.
Big up aux cultures qui utilisaient et continuent d’utiliser des cactus psychédéliques avec de la mescaline !
AFRIQUE
L’Afrique n’est pas souvent associée aux psychédéliques, du moins pas de l’extérieur. Cependant, les premières traces connues d’humains qui ont consommé des psychédéliques proviennent du continent africain. Les peintures rupestres du Tassili n’Ajjer ont été découvertes dans une grotte algérienne et remonteraient à environ 7 000 ans avant notre ère, soit environ 9 000 ans. Ces peintures représentent une créature à tête d’abeille avec de nombreux champignons qui dépassent de ses mains, et l’on pense généralement qu’elles impliquent l’utilisation de champignons psychédéliques. Le cas échéant, elles témoignent d’une longue et illustre relation entre les champignons magiques et les êtres humains.
Mais ce n’est pas tout. Par exemple, les cultures zouloues et sotho sont connues pour avoir utilisé toute une série de plantes visionnaires pour provoquer des visions et communier avec les esprits. Ces plantes, dont la plupart sont toxiques, sont les suivantes :
• Brachylaena elliptica (chêne argenté à feuilles amères) : les Zoulous utilisent les racines de cette plante pour traiter l’hystérie en Afrique du Sud.
• Cussonia paniculata (Umsenge) : les Sotho utilisent la feuille pour traiter les maladies nerveuses et mentales précoces ainsi que les troubles mentaux en Afrique du Sud.
• Helichrysum decorum (Imphepho) : les tradipraticiens zoulous (izangoma) inhalent la fumée des plantes brûlées pour induire un état de relaxation profonde utilisé lors de la divination.
• Turraea floribunda (chèvrefeuille des bois, Madlozana) : les tradipraticiens l’utilisent pour entrer dans l’état « névrotique » nécessaire aux danses divinatoires.
EUROPE
L’Europe, dans son ensemble, est un continent assez détaché de son histoire. Se considérant comme la définition de la modernité, elle efface sa propre histoire riche, y compris ses histoires psychédéliques.
Prenons l’exemple des druides de Grande-Bretagne. Ces cultures, dont on sait peu de choses, auraient entretenu une relation profonde avec le Psilocybe semilanceata (psilocybe lancéolé), une puissante espèce de champignon magique qui pousse dans la terre acide et détrempée de l’ouest de la Grande-Bretagne.
De plus, on a trouvé des mèches de cheveux testeées positives aux alcaloïdes atropine, scopolamine et éphédrine dans des sépultures vieilles de 3 000 ans à Minorque. Les deux premiers proviennent de la famille des morelles et le dernier du pin commun. Il s’agit de l’une des plus anciennes preuves directes que les peuples ancestraux consommaient clairement des substances psychédéliques.
AMÉRIQUE DU NORD
Nous retournons en Amérique, mais cette fois-ci au nord, aux États-Unis et au Canada. Le crapaud hallucinogène, qui est également originaire des déserts du Texas, fait à nouveau partie de la liste. De même, le peyotl, le plus célèbre des cactus avec de la mescaline, est également originaire des déserts du Texas et les peuples Comanche et Kiowa l’utilisent depuis longtemps. On l’utilise encore aujourd’hui pour provoquer des quêtes de vision.
Les groupes Arapaho et Iowa utilisaient les fèves de mescal en raison de leurs effets hallucinatoires. Dans la pratique, cela aboutissait souvent à ce que l’on appelle la « Red Bean Dance », une pratique communautaire traditionnelle. On pense que l’usage de ces fèves remonte à environ 9 000 ans, bien que ces chiffres soient incertains.
Le datura, connu sous le nom de toloache, est un délirant qui peut induire de puissantes visions hallucinogènes. Utilisée surtout par des groupes du Sud-Ouest, notamment les Zuni, c’est une plante sacrée utilisée par les prêtres et les chamans.
COMMENT ET OÙ LES PSYCHÉDÉLIQUES SONT-ILS CONSOMMÉS AUJOURD’HUI ?
On consomme encore des psychédéliques dans le monde entier. En effet, leur usage n’a jamais cessé, même si pour beaucoup de gens ces substances semblent avoir surgi dans la conscience collective au cours des dix dernières années, ou depuis les années 60. En réalité, elles sont devenues populaires auprès des Européens et des Nord-Américains au cours de ces périodes, mais cela ne représente qu’une infime partie de leur histoire.
L’usage des psychédéliques est donc aussi varié aujourd’hui qu’il l’a toujours été. Toutefois, la science moderne a récemment commencé à se pencher sérieusement sur ces composés et, grâce à des résultats positifs, leur confère une légitimité qui leur a longtemps fait défaut dans la majeure partie du monde nord-occidental. Ainsi, même les personnes les plus réfractaires aux substances et autres drogues sont ouvertes à l’idée que ces substances peuvent, en fait, avoir une certaine utilité.
Qui l’eût cru ?
LA CONSOMMATION PSYCHÉDÉLIQUE CHANGE-T-ELLE ?
La consommation de psychédéliques est en train de changer, à plus d’un titre. Alors que la plupart des personnes qui consomment ces substances y trouvent un certain degré de spiritualité, l’essor du microdosage a introduit une nouvelle façon de consommer les psychédéliques à des fins fonctionnelles. La pseudoscience s’est mêlée au fétichisme du capitalisme pour la productivité, l’efficacité et le bien-être, donnant naissance à la tendance du microdosage, un phénomène très moderne. Cela ne veut pas dire que c’est un pas en arrière, mais l’impulsion qui sous-tend sa popularité grandissante n’est pas si spirituelle.
Cela dit, certaines cultures sud-américaines arrachaient le cœur d’esclaves vivants lors de leurs cérémonies de champignons, ce qui prouve que tout n’a pas toujours été synonyme de paix et amour avec ce sujet.
De plus, avec l’essor des médias sociaux, le monde s’est refermé sur lui-même et le tourisme psychédélique est un autre phénomène nouveau qui en émerge. Il y a des avantages et des inconvénients à cela, et il s’agit en effet d’un sujet à débat au niveau social et économique. Mais avant tout, il y a une vérité simple : les êtres humains de toutes sortes aiment toujours tripper, et ça, c’est beau.
OÙ SE DIRIGE LE MOUVEMENT PSYCHÉDÉLIQUE ?
Espérons que la bruyante « renaissance psychédélique » invitera certains membres des groupes qui consomment des psychédéliques depuis longtemps à partager leur point de vue sur ce que ces substances ont à offrir. Tant que ces substances ne seront abordées que sous l’angle de la science occidentale, beaucoup de choses seront perdues au change. Et comme le montre cet article, il existe au moins 9 000 ans de connaissances sur les psychédéliques : il suffit de les trouver !