Les Champignons Magiques Peuvent-Ils Influer Les Céphalées En Grappe ?
Publié le :
Décembre 1, 2022
Categories :
Santé
Les céphalées en grappe, aussi connues sous le nom terrifiant de « céphalées suicidaires » peuvent être vraiment invalidantes. L’absence de traitement efficace sur le long terme fait que le monde se tourne vers les psychédéliques comme solution alternative. Mais qu’en dit la recherche ?
Les céphalées en grappe sont un type de mal de tête très invalidant, sans cause connue et sans traitement efficace. Nous observerons ici si la psilocybine (et le LSD) peuvent avoir un effet sur eux. Bien que limitées, nous évaluons les recherches disponibles pour voir si les psychédéliques ont un réel potentiel contre les causes et les symptômes des céphalées en grappe.
QUE SONT LES CÉPHALÉES EN GRAPPE ?
Aussi connu sous le nom de « Algie vasculaire de la face (AVF) » ou encore plus sinistre de « maux de tête/céphalées suicidaires », ce titre indique à quel point les maux de tête en grappe peuvent être graves et le degré de souffrance qu’ils peuvent engendrer.
En général, les céphalées en grappe apparaissent sur un côté de la tête, autour de l’œil. Outre une douleur extrême, elles peuvent s’accompagner de symptômes de congestion et d’inflammation nasales. Cette affection est plus susceptible d’apparaître entre 20 et 40 ans et est jusqu’à quatre fois plus fréquente chez les hommes. En plus d’apparaître soudainement, les céphalées en grappe ont tendance à disparaître avec l’âge.
Pourquoi ce nom ? Contrairement aux migraines qui peuvent se manifester fréquemment ou rarement, les maux de tête en grappe ont tendance à apparaître en grappes. Les périodes au cours desquelles ces maux de tête se manifestent peuvent durer de quelques mois à environ un an et chaque vague dure entre 15 minutes et 3 heures.
POURQUOI LES CÉPHALÉES EN GRAPPE SE PRODUISENT-ELLES ?
Quelles sont les causes des maux de tête en grappe ? Il semblerait qu’on manque d’informations pour répondre clairement à cela. Bien que la ou les causes soient inconnues, il existe quelques théories. Tout d’abord, on pense que le nerf trijumeau et le nerf facial sont des responsables dans les céphalées en grappe (Ferraro et al., 2019). D’anciennes théories suggèrent que le gonflement vasculaire peut exercer une pression sur ces nerfs, provoquant ainsi les symptômes. Cependant, des recherches plus récentes indiquent que cela pourrait être beaucoup plus complexe que cela.
Même si les subtilités sont inconnues, il semble que la génétique joue un rôle majeur dans la cause des céphalées en grappe. Par exemple, on estime que les personnes dont un parent au premier degré souffre de « maux de tête suicidaires » sont 14–48 fois plus susceptibles de développer elles-mêmes ce trouble (Nesbitt et Goadsby, 2012). De même, environ 10 % des personnes qui souffrent elles-mêmes de céphalées en grappe ont des antécédents familiaux de cette affection.
Bien qu’il semble y avoir peu d’indicateurs de mode de vie liés aux céphalées en grappe, fumer du tabac semble être un dénominateur commun. 65 % des personnes souffrant de céphalées en grappe fument ou ont des antécédents de tabagisme. Le pire, c’est que l’arrêt du tabac semble n’avoir aucun effet sur l’affection une fois qu’elle s’est déclarée. Cela dit, d’autres recherches suggèrent que les personnes souffrant de céphalées en grappe sont peut-être simplement plus susceptibles de fumer et que cela ne peut être considéré comme une cause (Nesbitt & Goadsby, 2012).
Enfin, plus récemment, on a découvert sur des TEP-scans que l’hypothalamus s’active lorsque les patients souffrant de céphalées en grappe subissent une attaque (Naber et al., 2019). Comme cela est étroitement lié à l’horloge biologique et que les céphalées en grappe semblent avoir des rythmes diurnes et saisonniers, les problèmes liés à l’hypothalamus pourraient être une cause majeure. Cependant, la recherche sur ce sujet n’en est qu’à ses débuts.
Malgré diverses théories, la véritable réponse reste un mystère. Cela devient assez notable si l’on considère que les traitements existants sont plutôt inefficaces et s’attaquent principalement aux symptômes plutôt qu’aux causes.
QUELS SONT LES TRAITEMENTS DES CÉPHALÉES EN GRAPPE ?
Les traitements des céphalées en grappe se répartissent en trois catégories : abortifs, transitoires et préventifs. Souvent, les traitements de ces trois catégories sont utilisés conjointement.
Le principal traitement utilisé est un médicament appelé vérapamil. Le vérapamil est un inhibiteur des canaux calciques qui affecte le rythme circadien. Cela conforte la théorie selon laquelle l’hypothalamus pourrait jouer un rôle dans l’apparition des céphalées en grappe. Hélas, ce traitement n’est pas exempt d’effets secondaires comme :
- Douleurs thoraciques et un rythme cardiaque rapide ou lent
- Étourdissements
- Essoufflement
- Fièvre
- Douleurs à l’estomac
- Problèmes pulmonaires
- Anxiété
De plus, le vérapamil présente une série d’interactions dangereuses avec d’autres médicaments et cela le rend inadapté dans de nombreux cas.
Les stéroïdes, en particulier les glucocorticoïdes, sont utilisés comme traitement en cas de crise. Même si cela s’avère efficace dans les trois jours, les traitements ne peuvent durer qu’entre 8 et 10 jours en raison des dangers liés à la prise de traitements stéroïdiens pendant des périodes prolongées. Cela en fait une option inadaptée à long terme étant donné la durée pendant laquelle les céphalées en grappe peuvent persister.
Enfin, dans les cas extrêmes et résistants au traitement, une intervention chirurgicale peut avoir lieu. La stimulation cérébrale profonde ou la stimulation du nerf occipital sont les deux interventions chirurgicales disponibles et semblent fonctionner dans environ 60 % des cas. Cependant, il s’agit de traitements invasifs qui s’accompagnent de nombreux risques liés à la chirurgie et sont donc réservés à des cas exceptionnels.
Étant donné que ces traitements sont d’une efficacité limitée et qu’ils s’accompagnent d’une batterie d’effets secondaires négatifs, il y a certainement de la place pour des traitements non invasifs capables de présenter des résultats encourageants et une liste d’effets secondaires moins graves et invalidants. Des recherches récentes suggèrent que les drogues psychédéliques pourraient être une alternative à cet égard.
PSILOCYBINE ET CÉPHALÉES EN GRAPPE : CE QU’IL FAUT SAVOIR
La psilocybine, le composé actif des champignons magiques, fait l’objet de nombreuses recherches sur les céphalées en grappe. Bien que loin d’être concluantes, les études préliminaires et les preuves anecdotiques sont prometteuses.
COMMENT LES CHAMPIGNONS MAGIQUES AGISSENT-ILS SUR LES CÉPHALÉES EN GRAPPE ?
L’une des écoles de pensée derrière l’utilisation des champignons magiques contre les symptômes des maux de tête suicidaires se concentre sur la structure du noyau indole de la psilocybine (The Psilocybin Mushroom, n.d). On pense que les noyaux indoles interagissent avec les récepteurs de la sérotonine dans le cerveau et l’on sait en effet que la psilocybine (plus précisément la psilocine) exerce ses effets en partie en interagissant avec les récepteurs 2A de la sérotonine.
La théorie suggère que l’activation des récepteurs de la sérotonine peut provoquer une vasoconstriction (la constriction des vaisseaux sanguins), réduisant ainsi la pression sur le nerf trijumeau. Bien que l’on ne sache pas si cela est la cause des maux de tête en grappe, le cas échéant, cela pourrait aider à clarifier le potentiel de la psilocybine.
LES CHAMPIGNONS MAGIQUES PEUVENT-ILS SUPPRIMER LES CÉPHALÉES EN GRAPPE ?
Une première étude suggère des effets significatifs de la psilocybine et du LSD sur les céphalées en grappe (Sewell et al., 2006).
Les chercheurs ont interrogé 53 patients souffrant de céphalées en grappe qui avaient utilisé soit la psilocybine, soit le LSD pour leurs céphalées en grappe. Leurs résultats ont montré ce qui suit :
- 22 des 26 utilisateurs de psilocybine ont déclaré que cette substance avait interrompu leurs crises.
- 25 des 48 utilisateurs de psilocybine ont déclaré avoir mis fin à une seule vague de grappes, 7 des 8 utilisateurs de LSD ont vécu la même chose.
- 18 des 19 utilisateurs de psilocybine ont signalé une prolongation des périodes de rémission, 4 des 5 utilisateurs de LSD ont déclaré la même chose.
Bien que prometteurs et certainement assez convaincants pour justifier des recherches plus approfondies, ces résultats ne sont pas suffisants pour tirer des conclusions. Tout d’abord, le groupe de patients était très petit et des études bien plus importantes sont nécessaires. Deuxièmement, il n’y a pas de contrôles, donc il n’y a aucun moyen de savoir si les drogues psychédéliques ont eu des effets causals ou si leur utilisation est simplement corrélée avec l’interruption/rémission. Enfin, il n’est pas clair quels autres médicaments ces patients prenaient en même temps et donc ni la psilocybine ni le LSD ne peuvent être isolés comme responsable.
LES CHAMPIGNONS MAGIQUES PEUVENT-ILS PROVOQUER LA RÉMISSION DES CÉPHALÉES EN GRAPPE ?
Une recherche plus importante et similaire à celle mentionnée ci-dessus a interrogé 496 personnes souffrant de céphalées en grappe (Schindler et al., 2015). Elle a noté des effets significatifs de la psilocybine et du LSD en ce qui concerne l’interruption et la rémission des céphalées en grappe. Les personnes interrogées ont noté que ces drogues étaient capables d’interrompre les crises et de provoquer une rémission durable. De plus, ils ont également estimé que les psychédéliques avaient tendance à être plus efficaces que les médicaments qu’ils prenaient.
Il est intéressant de noter que des doses faibles et peu fréquentes semblaient être efficaces. Ainsi, plutôt que de prendre régulièrement des doses importantes et hautement psychédéliques de ces drogues, ils ont pu obtenir les résultats souhaités avec des doses non hallucinogènes.
Encore une fois, bien que prometteuse, cette recherche présente quelques lacunes. Elle n’a pas été menée dans un cadre clinique, mais s’est plutôt appuyée sur les réponses des personnes sondées à une enquête en ligne. De plus, même si les preuves anecdotiques sont convaincantes, il n’y a aucun moyen d’être certain que les drogues psychédéliques ont réellement provoqué les effets observés. Malgré tout, c’est certainement suffisant pour inciter à poursuivre d’autres recherches.
QU’EN EST-IL DU LSD ET DES CÉPHALÉES EN GRAPPE ?
Comme vous l’avez peut-être remarqué, ces études ne portent pas uniquement sur la psilocybine, mais aussi sur le LSD. En fait, certaines études indiquent que le LSD pourrait être plus efficace que la psilocybine dans ce cas présent. Il est important de noter que le LSD et la psilocybine possèdent tous deux des noyaux indoles, ce qui contribue à étayer la théorie selon laquelle ce sont ces parties de leur composition moléculaire qui leur permettent d’exercer des effets notables.
En général et par rapport au LSD, la psilocybine a l’avantage d’avoir moins d’effets secondaires négatifs. Ceci étant dit, si des doses non hallucinogènes de l’une ou l’autre des drogues sont suffisantes, déterminer laquelle est la plus efficace pour provoquer l’interruption et la rémission serait fort utile.
CÉPHALÉES EN GRAPPE : ENCORE BIEN DES MYSTÈRES
Les céphalées en grappe restent un mystère et les traitements demeurent rares et problématiques. Cependant, les recherches actuelles ne sont pas suffisantes pour soutenir la psilocybine ou le LSD comme traitements viables de cette affection et nous ne recommandons pas de s’y pencher sans un soutien médical professionnel.
Quoi qu’il en soit, il semble qu’il y ait suffisamment de preuves pour soutenir des recherches plus approfondies sur les interactions entre les psychédéliques et les céphalées en grappe et qu’elles pourront aider les personnes affectées par ce trouble des plus invalidants.